Et comment peut-on l'éviter…
Les portiques se distinguent des autres systèmes multi-axes (comme les robots cartésiens et les tables XY) par l'utilisation de deux axes de base (X) parallèles, reliés par un axe perpendiculaire (Y). Si cette configuration à deux axes X offre une large empreinte au sol et une grande stabilité, et permet aux portiques d'atteindre une capacité de charge élevée, de grandes courses et une bonne rigidité, elle peut également engendrer un phénomène communément appelé « effet de crénelage ».
Lorsque deux axes linéaires sont montés et connectés en parallèle, il existe un risque de désynchronisation. Autrement dit, lors du mouvement, l'un des axes X peut accuser un retard par rapport à l'autre, et l'axe en avance tentera d'entraîner l'axe en retard. Dans ce cas, l'axe de liaison (Y) peut se désaxer, n'étant plus perpendiculaire aux deux axes X. Cette perte d'orthogonalité entre les axes X et Y est appelée déformation angulaire et peut entraîner un blocage du système lors de son déplacement selon l'axe X, ainsi que des forces potentiellement dommageables sur les deux axes.
Le phénomène de crénelage dans les systèmes de portique peut être dû à divers facteurs de conception et d'assemblage, mais l'un des plus importants est le mode d'entraînement des axes X. Avec deux axes X en parallèle, les concepteurs peuvent choisir d'entraîner chaque axe X indépendamment, ou d'en entraîner un seul et de considérer l'autre comme un axe « esclave » ou suiveur.
Dans les applications à basse vitesse où l'écart entre les deux axes X est relativement faible (course réduite de l'axe Y), il est acceptable de n'entraîner qu'un seul axe X et de laisser le second se comporter comme un suiveur, sans mécanisme d'entraînement. Dans cette conception, la rigidité de la liaison entre les axes, autrement dit la rigidité de l'axe Y, est un point crucial.
Comme l'axe entraîné tire en quelque sorte l'axe non entraîné, toute déformation (flexion, torsion, etc.) de leur liaison peut entraîner une différence de frottement ou de charge entre les deux axes X, provoquant immédiatement un jeu et un blocage. Plus l'axe Y est long, moins il est rigide. C'est pourquoi la configuration « entraîné-suiveur » est généralement recommandée pour les applications où la distance entre les axes X est inférieure à un mètre.
La solution d'entraînement la plus sophistiquée consiste à utiliser un moteur distinct sur chaque axe, les moteurs étant synchronisés selon un modèle maître-esclave par le biais du contrôleur. Dans cette configuration, cependant, les erreurs de course des entraînements mécaniques doivent être parfaitement (ou presque) appariées ; sinon, de légères variations dans la distance parcourue par chaque axe à chaque tour de moteur peuvent provoquer des créneaux et des blocages.
Pour les applications de portiques de haute précision et à grande vitesse, les mécanismes d'entraînement privilégiés sont généralement les vis à billes et les systèmes pignon-crémaillère. Ces deux technologies peuvent être appariées afin d'obtenir une erreur linéaire similaire sur chaque axe, limitant ainsi l'accumulation d'erreurs pouvant survenir avec des ensembles d'entraînement non appariés. Les entraînements par courroie et par chaîne, présentant des erreurs de pas difficiles à apparier et à compenser, sont généralement déconseillés pour les systèmes de portiques lorsque les axes X sont entraînés indépendamment. En revanche, les moteurs linéaires constituent un excellent choix pour les axes parallèles des systèmes de portiques, car ils sont exempts d'erreur mécanique et permettent d'atteindre de grandes courses et des vitesses élevées.
Une autre solution, un compromis entre les deux options décrites précédemment, consiste à utiliser un seul moteur pour entraîner les deux axes X. Pour ce faire, on relie la sortie de l'axe motorisé à l'entrée du second axe par un accouplement à distance (également appelé arbre de liaison). Cette configuration permet de se passer du second moteur (et de la synchronisation qui en découlerait).
Cependant, la rigidité en torsion de l'accouplement est importante. Si le couple transmis entre les axes provoque un enrouement de l'accouplement, des déformations et des blocages peuvent survenir. Cette configuration est souvent un bon choix lorsque la distance entre les axes X est comprise entre un et trois mètres, avec des exigences de charge et de vitesse modérées.
Un autre facteur pouvant engendrer des déformations dans les systèmes à portique est le manque de précision de montage et de parallélisme entre les deux axes X. Lorsque deux guidages linéaires sont montés et fonctionnent en parallèle, ils doivent respecter certaines tolérances de parallélisme, de planéité et de rectitude afin d'éviter la surcharge des roulements de l'un ou des deux guidages. Dans les systèmes à portique, où les axes X sont généralement très espacés (en raison de la grande course de l'axe Y), le montage et le parallélisme des axes X deviennent encore plus critiques, les erreurs angulaires étant amplifiées sur de grandes distances.
Les différentes technologies de guidage requièrent des niveaux de précision variables en matière de parallélisme, de planéité et de rectitude. Dans les applications à portique, la meilleure technologie de guidage linéaire pour les axes X parallèles est généralement celle qui offre la plus grande tolérance aux erreurs de montage et d'alignement, tout en garantissant la capacité de charge et la rigidité requises.
Les guidages à billes ou à rouleaux profilés à recirculation offrent généralement la capacité de charge et la rigidité les plus élevées de toutes les technologies de guidage linéaire. Cependant, en configuration parallèle, ils exigent une grande précision dans la hauteur de montage et le parallélisme afin d'éviter tout blocage. Certains fabricants proposent des versions « auto-aligneuses » de roulements à billes à recirculation capables de compenser certains défauts d'alignement, au prix toutefois d'une réduction de la rigidité et de la capacité de charge.
En revanche, les galets de guidage fonctionnant sur des rails de précision exigent une précision de montage et d'alignement moindre que les guides sur rails profilés. Ils peuvent même être montés sur des surfaces présentant des irrégularités modérées sans provoquer de problèmes de fonctionnement tels que des vibrations ou des blocages, même avec deux rails en parallèle.
Bien que l'alignement puisse être réalisé avec des outils simples tels que des comparateurs à cadran et des fils, les grandes longueurs des systèmes de portiques rendent souvent cette méthode impraticable. De plus, l'alignement de plusieurs axes parallèles et perpendiculaires accroît la complexité, le temps et la main-d'œuvre nécessaires de façon exponentielle.
C’est pourquoi un interféromètre laser est souvent le meilleur outil pour garantir la rectitude, la planéité et l’orthogonalité entre les axes du portique.
Date de publication : 17 février 2020





